Je ne savais encore pas que je quittais un endroit qui allait compter toute ma vie.

Comme le jour de mon arrivée j'étais triste et j'ai pleuré. C'était d'ailleurs le cas de la plupart d'entre nous.

Je me souviens d'une jeune fille qui le jour de son arrivée a fait un malaise tellement qu'elle a pleuré. Et elle a fait aussi un malaise le jour de son départ.

C'est vrai que le jour de notre arrivée nous étions tristes - triste de quitter notre famille - nos proches et surtout nous avions peur. Peur de la maladie bien sûr mais aussi de ce que nous allions vivre.

Pour la plupart c'était une première séparation d'avec les proches

C'est vrai que les jours de tristesse à la Ravoire étaient ponctués par les départs et par les arrivées.

Mais à l'arrivée la tristesse partait bien vite. Il fallait bien se consoler et accepter ce que nous pensions être une prison.

Il fallait tout apprendre - les règles de vie - la discipline - les horaires - le groupe.

Mais quand j'ai quitté la Ravoire j'ai du réapprendre à vivre avec ma famille. Son histoire avait terriblement changé et j'ai eu le sentiment de ne plus faire partie de cette famille.

Ma sœur venait de se marier et j'ai du aller vivre avec elle en Alsace alors que moi tout ce que j'aurais voulu c'était reprendre ma vie là où je l'avais laissé - dans le sud !

Il a fallu que j'apprendre le caractère des alsaciens - le climat et qu'encore une fois je me refasse des potes - facile vous me direz quand on a 15 ans.

Le plus dur a été d'expliquer ma situation ; mon accent du sud avec un dossier scolaire de Haute Savoie. Comment expliquer cela en évitant de parler de ma maladie. Mes parents ont du expliquer aux profs pourquoi certaines fois je serais fatiguée, que je ne pourrais pas faire de sport comme tout le monde et pourquoi je ressemblais encore à un marshmallow à cause de la cortisone qui circulait encore dans mon corps et que je continuais à prendre

Ah oui parce qu'il faut dire que j'ai du continuer mon traitement médical à la maison. J'ai emporté le rimifon en Alsace durant 6 mois .. et si ce n'était que lui !!!

Bref pour moi le retour à la réalité n'a pas été vraiment une partie de plaisir.

Et surtout j'ai du quitter mes amies de la Ravoire et surtout Kate. Et j'avoue que cette séparation brusque a été vraiment un traumatisme

Je n'avais pas envie en plus d'aller vivre chez ma sœur mais c'était les ordres des médecins je ne devais pas être en contact avec mon père - la source de ma contagion - aussi longtemps qu'il n'était pas en rémission ..

Mon père était la tuberculose ambulante. Il a du faire au moins une vingtaine de rechutes et à la fin de sa vie la tuberculose était tellement contagieuse qu'il était dans un service spécial

De vivre chez ma sœur était une seconde punition. Je n'étais pas avec mes parents et ma famille avait changé. un étranger avait pris ma soeur et l'avais emmené vivre dans un autre pays

Parce que pour moi l’Alsace c'était l’Allemagne. Le plus dur à accepter en Alsace était le dialecte - rien n'à voir avec celui chantant des gens du sud. Une langue rude et dure comme sera le premier hiver que j'y ai passé

Je détestait tout - les gens comme le paysage haut en couleurs mais sans la moindre odeur.

Plus d'odeur de thym et de ciboulette et de toutes les odeurs qui sont la force du sud. Même la Haute Savoie avait plus d'odeur que ces paysages de forêts et de verdure

Quand je rentre dans le sud j'ouvre le plus grand possible mes poumons et je respire toutes ces odeurs qui me manquent tellement

Les premiers temps ont été une vraie torture pour moi mais je me suis fait rapidement des potes à nouveau et j'ai fini par aimer l'Alsace

Et la Ravoire est restée dans mon cœur enfouie durant des années ....

 

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